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Comment les animaux vivent au Sahara

Désert saharien


Comment les animaux vivent au Sahara


Il y a environ 8 000 ans, au Néolithique, le Sahara n'était pas un
désert, mais une savane où vivaient éléphants et girafes, tandis que
ses lacs abritaient des perches du Nil et des crocodiles. En devenant
de plus en plus sèche, la région a contraint les espèces animales à
s'adapter à des conditions extrêmes de chaleur et de sécheresse.

Des stratégies diverses
Les espèces véritablement "désertiques" vivent dans les dunes, sur les
hamadas et les regs du Sahara. Elles ont développé des mécanismes
favorisant l'économie de l'eau, ce qui leur permet d'éviter, de tolérer
ou de contrôler l'excès de chaleur. Certaines espèces évitent les
températures excessives grâce à leur mode de vie, souterrain ou
nocturne. D'autres résistent à la chaleur au moyen de téguments durs et
imperméables. D'autres encore, par leur métabolisme, se contentent de
l'eau contenue dans les plantes qu'ils consomment.
Les animaux terrestres perdent leur eau par la transpiration, par la
respiration et par l'excrétion de l'urine. Beaucoup de petits habitants
du désert, avant de rejeter l'air de la respiration, le rafraîchissent
dans leurs narines et condensent ainsi l'eau qu'il contient. La plupart
des animaux désertiques, comme les insectes, les reptiles et les
oiseaux, produisent des excréments très concentrés sous forme d'acide
urique solide, une manière de réduire les pertes d'eau urinaires et
fécales. Quant aux reins des mammifères désertiques, ils concentrent
l'urine de telle sorte que celle-ci contienne moins d'eau pour une
quantité donnée d'urée que l'urine des espèces non désertiques.
Certains animaux du désert résistent aux fortes chaleurs, grâce à une
régulation thermique différente. Mais la vie dans un terrier constitue
le moyen le plus répandu pour se protéger des températures excessives
du désert. Dans tout terrier, en effet, l'humidité et la température
sont plus régulières qu'en surface. L'air qui s'y trouve joue le rôle
d'isolant thermique, en même temps qu'il est réchauffé et humidifié par
la présence et la respiration des animaux.
Enfin, diverses adaptations de la morphologie et du comportement aident
les animaux désertiques à se déplacer, à s'enfouir rapidement, à vivre
dans un terrier, etc.

Les grands mammifères désertiques
Les mammifères de grande taille ne peuvent se soustraire aux conditions
désertiques, mais ils ont développé des facultés physiologiques
particulières.
Grâce aux cils longs et aux muscles de leurs narines qui peuvent se
fermer, les dromadaires sont protégés des vents de sable. Leur épaisse
toison et leurs réserves dorsales de graisse font écran aux radiations
solaires. Leur température corporelle varie, augmentant le jour et
diminuant la nuit. Ils évitent ainsi les pertes d'eau par évaporation,
d'autant qu'ils ne transpirent qu'au-delà de 41°. Ils perdent moins
d'un litre d'eau par jour par l'urine et réduisent encore ce volume
lorsqu'ils sont déshydratés. Ils ne font pas de réserve d'eau, mais
sont capables de supporter des déshydratations sévères. Ils ne boivent
que pour compenser leurs pertes. Un dromadaire qui a perdu 30 % de son
poids ne montre aucun signe de fatigue et il peut, dans cet état, boire
120 litres d'eau sans risque d'indigestion hydrique.
Les gazelles et les antilopes trouvent dans les plantes la majeure
partie de leur eau. Elles parcourent de grandes distances à la
recherche de végétation, leurs larges sabots leur permettant de
traverser le sable sans difficulté.

Les petits mammifères désertiques
La plupart des petits mammifères vivent dans des terriers pendant le
jour et ne recherchent leur nourriture que la nuit. Certains tombent
même en léthargie pendant les mois les plus chauds : c'est
l'estivation. Ils ne boivent pas, extrayant l'eau des plantes ou des
graines dont ils se nourrissent. Presque toutes leurs fonctions
physiologiques concourent à l'économie de l'eau. Leur urine est
particulièrement concentrée.
Grâce à leurs pattes postérieures allongées, les gerboises et les
gerbilles se déplacent très rapidement en sautant. Leurs pattes
antérieures, courtes, servent à creuser dans le sable.
Beaucoup de ces rongeurs possèdent des oreilles très développées. Ce
caractère évolutif montre que ces espèces, nocturnes dans leur majorité
privilégient le sens de l'ouïe. Chez les lièvres du désert, les larges
oreilles, irriguées par de nombreux vaisseaux sanguins, contribuent
aussi à la régulation thermique du corps. Une audition améliorée
facilite, en outre, les contacts et donc la reproduction, dans une
population dispersée.

Les oiseaux désertiques
Les oiseaux sont adaptés à la vie désertique par leur comportement ou leur physiologie, plus que par leur morphologie.
Il existe deux catégories très différentes d'espèces : les
nidificateurs, véritables oiseaux désertiques et les migrateurs. Les
premiers sont en nombre restreint, corbeau brun, bouvreuil githagine,
alouettes, sirli, traquets, gangas, courvite isabelle, outarde houbara,
etc.
Les insectivores sont les mieux représentés mais granivores et
carnivores se rencontrent également. Le faucon lanier, l'un des rapaces
les plus rapides, s'empare fréquemment d'oiseaux plus petits, bien que
les lézards forment la base de son régime.
Dépourvus de glandes sudoripares, les oiseaux évitent une augmentation
excessive de leur température par des artifices de comportement ou bien
par l'évaporation que provoque leur respiration. La plupart d'entre eux
se contentent de l'eau de leur nourriture, mais quelques granivores
doivent boire et demeurent donc inféodés aux points d'eau.
Diurnes pour la plupart, les oiseaux désertiques se réfugient dans les
rares coins d'ombre. Les alouettes nichent sous les buissons, les
traquets dans les trous des rochers. Sans cette stratégie, les oeufs,
notamment ceux des petites espèces, "cuiraient" au soleil. Les femelles
gangas peuvent nicher à même le sol, grâce à une poche abdominale
antithermique qui leur permet de rester couchées sur le sol brûlant à
des températures de près de 70 °C. Pour aller boire, ces oiseaux
peuvent couvrir, chaque jour, jusqu'à 70 km. Les plumes de leur ventre
ont des barbes et des barbules lisses, sans les crochets traditionnels.
Enroulées en spirale, elles se déploient dans l'eau qui est alors
absorbée par les extensions capilliformes des barbules. Les petits
"têtent" ensuite le duvet gorgé d'eau.

Les reptiles désertiques
La peau des reptiles désertiques est dépourvue de glandes sudoripares.
Leur urine est semi-solide. Leurs besoins en eau sont satisfaits par
leur seule nourriture.
La température des reptiles est soumise à l'environnement. Les lézards
sont léthargiques par temps froid. Au soleil, au contraire, leur
température interne s'élève. Ils règlent ainsi leur optimum corporel
par leur comportement.
Beaucoup de lézards s'enfoncent dans le sable ou dans des crevasses
rocheuses, ou bien creusent des terriers. Les lézards à queue large,
comme les fouette-queues ou uromastix, accumulent des réserves
graisseuses dans leur queue, ce qui leur permet de subsister durant les
périodes les plus sèches.
La tortue striée, qui vit dans le sud du Sahara, se rafraîchit la tête,
le cou et les pattes antérieures avec sa salive dès que sa température
dépasse 40,5 °C. Elle accumule les déchets de son métabolisme dans la
vessie : l'urine, très concentrée, ne serait émise que lorsqu'une pluie
ou une source d'eau lui permet de boire.
Les serpents trouvent des trous ou des fissures pour s'abriter des
grandes chaleurs. Leur peau presque imperméable et leur urine très
concentrée contribuent à réduire leur perte en eau. Leur régime
carnivore leur assure, en outre, une nourriture riche en liquide.

Les arthropodes désertiques
Chez les arthropodes du désert (scorpions, araignées, insectes, etc.)
qui se partagent en espèces nocturnes, matinales ou vespérales, le
rythme quotidien connaît généralement un ralentissement de l'activité
aux heures chaudes. Leur premier moyen de lutte contre les pertes d'eau
est leur squelette externe, véritable cuirasse rendue quasi imperméable
par la sécrétion d'une matière cireuse.
Les scorpions passent le jour à l'ombre et sont actifs la nuit.
Les galéodes, arachnides non vénéneux, ont des pattes pouvant mesurer
15 cm. Cela leur permet des déplacements très rapides, lors des chasses
qu'elles effectuent généralement la nuit. Le jour, elles se terrent
dans des trous de rochers ou sous les pierres.
Avec les fourmis et les termites, les coléoptères sont les rois du
Sahara. Les espèces de la famille des ténébrionides sont des éléments
essentiels de la faune désertique. Chez la plupart d'entre elles, les
ailes, non fonctionnelles, sont soudées sur la ligne médiane et forment
un étui qui couvre complètement le dos : l'espace ainsi formé contre le
corps retient une certaine masse d'air qui joue un rôle isolant.


Michel Lemire et Geneviève Meurgues
Professeurs au Muséum National d'Histoire Naturelle

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